Grandir avec les fantômes du passé

Par Marc-Olivier Parlatano

Au bord du lac Sevan, dans le ­Caucase, le violoncelliste Joseph Landolt se repose alors qu’il vient d’entamer une carrière internationale: «Il avait trouvé le pays intérieur qu’il cherchait depuis longtemps, l’Arménie.» Mais pour y parvenir, la route n’a pas été facile.

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Dans Un si dangereux silence, le Genevois Harry Koumrouyan raconte comment Joseph Landolt apprend, par bribes, d’où il vient: il découvrira qu’il descend d’une famille arménienne qui a trouvé refuge en Suisse après avoir échappé au génocide commis en 1915 dans l’empire ottoman. Dès lors, Joseph va essayer de se libérer d’un récit ­familial qui lui paraît lourd à porter.

Le premier roman d’Harry Koumrouyan, ancien directeur de collège à la retraite, ne se ­déroule pas de façon linéaire et ses chapitres sont riches en rebondissements. Les fantômes du passé hantent à plus d’une occasion les survivants, ­comme s’en apercevra Joseph. Alors qu’il a rendez-vous à New York avec Elsie pour une leçon de musique, la mystérieuse jeune élève ne vient pas: il en comprendra la raison un peu plus tard, dans l’une des scènes les plus étranges de l’ouvrage.

La question des origines tient une place centrale dans Un si dangereux silence, peuplé de personnages marqués par des passions et des ruptures, tel l’oncle Kevork qui quitte la forêt du Brésil où il se cachait et revient à Genève, ou encore Mehmet, étudiant turc en médecine qui découvre la dimension cachée de ses racines – mais un peu tard pour intégrer sa nouvelle identité qui, en quelque sorte, le tue. L’ouvrage voit aussi se confronter l’ambition, la nostalgie, la douleur et l’amour, et mène à s’interroger bien au-delà de l’histoire des Arméniens, quand il souligne l’impact des «mots qu’on ne dit pas» sur la construction d’un individu.

Source: http://www.lecourrier.ch/136640/grandir_av...